Sculptures de François BENOIT
SCULPTURES de François BENOIT
Prologue à un pandemonium
Si le thème choisi me conduit naturellement à jouer mystère sur les parvis, j'ai longtemps hésité à propos du titre. Se disputaient pour la première place, Le Prince de ce monde, rendu célèbre par l'Evangile de Jean, mais encore Belzébuth, Asmodée, Méphistophélès, Lucifer dont l'origine restait à mettre en lumière ! Et Satan ? nommé abondamment dans les Evangiles de Mathieu, Luc et Marc, Satan semblait avoir un peu d'avance, d’autant plus que l’actuelle pandémie nous rappelle que, depuis l'antiquité, on rapporte que les maladies contagieuses sont véhiculées par une catégorie des esprits dits de l'air, dont le Prince n'est autre que ce même Satan. De Pandémie à Pandémonium, il n'est qu'un jeu de lettres. La Pandémie a fait le lit du Pandémonium, et préparé la convocation sur terre des entités démoniaques, contrepied du Prologue au ciel de Goethe.
Sous ses diverses appellations, le Diable génère donc un champ surdéterminé de significations contradictoires coexistant au sein d’une même conscience. La sculpture, devient lieu de condensation en objectivant les thèmes traités sous une forme concrète et permet de les faire passer sur le versant de la réflexion symbolique en leur ôtant une partie de leur charge émotionnelle. Toutefois, l'enjeu qui n’est rien moins que celui de l'existence du diable, implique de faire un quasi-procès de Dieu, Quel dieu, quel diable ? D'où sont-ils conçus, qui les aurait vu naître ? Quels sont les parents ?
Car on parle bien de naissance. Pour une religion révélée, chaque révélation de Dieu se manifeste essentiellement comme une naissance de Dieu dans une âme, cette rencontre devient la source de la foi ; et déjà là se profile le danger : en effet, si la naissance de Dieu se fait selon l'âme dans laquelle il se révèle, tout peut arriver... selon l’âme d’accueil, on risque de rendre un culte à un dieu de basse qualité, assimilable au démon ; le mauvais démiurge de Cioran et des gnostiques n’est pas loin. Cette digression pour vous dire que le sujet tout caricatural qu’il paraisse ne nous met pas à l'abri d'un retour d’un feu qui ne viendrait pas du ciel